Isabelle Duquesnoy, l'Histoire par le petit trou de la serrure !

Le 12 Mai 2023 - Par Greg Catel pour La Griffe Noire.
Tous ses ouvrages sont des coups de coeur à La Griffe Noire et son dernier roman, La chambre des diablesses, est une pépite !
Rencontre avec Isabelle Duquesnoy...
La Griffe Noire : Bonjour Isabelle. Nous avons eu le bonheur de vous recevoir très récemment à l'occasion de la parution de votre dernier roman historique, La Chambre des diablesses chez Robert Laffont. Que ce soit pour « Les confessions de Constanze Mozart », « L’Embaumeur », « La Pâqueline » et aujourd’hui avec « La chambre des diablesses », vos récits se situent, soit pendant le règne de Louis XIV, soit juste après la Révolution française. Pourquoi cette période de l’histoire de France ?
Isabelle Duquesnoy : J’aime particulièrement les époques aux mœurs légères, au langage riche et drôle, aux nourritures bizarres et aux divertissements variés. Le ridicule des modes m’inspire, et je ne peux m’empêcher de comparer les contraintes vestimentaires d’hier à celles d’aujourd’hui, les métiers disparus et les remèdes délirants de médecines.
Je me suis donc longtemps tournée vers les époques que je connais bien, pour m’épargner des mois de recherche avant de commencer à écrire. Me replonger dans ces périodes affectionnées me procure toujours une vraie jubilation, un peu comparable au bonheur de revenir dans un endroit que l’on aime passionnément.
La Griffe Noire : Tous vos romans sont empreints de personnages truculents, d’humour, et d’un sens incroyable et poussé du détail historique. Vous avez une formation d’historienne. Avez-vous le sentiment d'être une raconteuse d’Histoire, ou une conteuse d’histoires ? Jusqu’où poussez-vous vos recherches pour plonger vos lecteurs dans la réalité de l’époque ?
Isabelle Duquesnoy : Parce que l’humour est rare dans le roman historique, j’en mets beaucoup dans les miens. C’est une politesse envers les lecteurs, car l’humour permet d’alléger une lecture relatant des événements complètement dingues ou sinistres. Et je profite toujours de mes dialogues pour placer les reparties d’époque, offrant l’avantage de les rendre réalistes.
« La Chambre des diablesses » a nécessité une longue préparation, car je suis pointilleuse et j’entendais proposer aux lecteurs un récit truffé d’anecdotes authentiques.
L’écriture d’un roman historique implique des recherches et des vérifications préalables qui prennent un temps fou, et ne permet pas les approximations ni les affirmations hasardeuses. Je vérifie tout, y compris la météo.
Donc, ma phase préparatoire dure entre 4 et 6 mois.
Je ne suis pas conteuse. Je suis voyeuse ! Je raconte l’Histoire de manière impertinente, comme observée par un trou de serrure.
Jusqu’où vais-je pour plonger le lecteur dans la réalité de l’époque ? Jusqu’à la frénésie, l’insomnie. Durant l’écriture, mon roman est une présence permanente et obsédante. Je ne sais pas me « débrancher », et d’ailleurs rien ne m’oblige à le faire jusqu’à la dernière ligne.
La Griffe Noire : Certains acteurs de théâtre disent leur difficulté de se défaire d’un personnage qu’ils ont joué. Est-ce le cas pour un auteur ? Pour vous ? On imagine bien le travail énorme qu’il faut pour se plonger par exemple dans la vie, les sentiments de Constanze Mozart… De l’amour d’une mère pour Victordu…
Isabelle Duquesnoy : Je n’ai pas de difficultés à « quitter » un personnage, une fois que mon livre est écrit. Mais plutôt qu’une séparation entre mes héros et moi, je dirais qu’on fait une pause.
Une fois le livre en librairie, il ne m’appartient plus, mais il revient vers moi : les séances de dédicaces, les rencontres littéraires et les salons me procurent de nouveaux rendez-vous avec mes héros, et je les retrouve avec la même flamme passionnée.
La femme de Mozart est un personnage inoubliable, mon Embaumeur et sa mère ne sont pas des gens ordinaires, et la Voisin, empoisonneuse à la cour de Louis XIV, est une curiosité de la nature.
J’explore beaucoup l’amour qui relie les gens, parce que c’est un sentiment d’une grande complexité, qui court-circuite souvent leurs capacités de discernement.
La Griffe Noire : Votre dernier roman, "La chambre des diablesses"… C’est historique, mais en même temps un vrai Polar. Quelle à été votre rencontre avec Catherine dites « la Voisin » ?
Isabelle Duquesnoy : Elle est venue à moi par la lecture d’une lettre de Mme de Sévigné, racontant le spectacle du bûcher de La Voisin, et les impensables gros-mots qu’elle avait prononcés à la face du curé, devant la foule impatiente de la voir flamber, au lieu de demander pardon. Après avoir été perturbée par cette « vision » pendant plusieurs jours, je me suis plongée dans sa vie et j’ai découvert que sa fille de 21 ans avait été son assistante.
Chargée de recevoir les clientes, puis de préparer des potions mortelles, cette jeune fille a été accusée de complicité, puis emprisonnée et interrogée pendant 3 ans. J’ai donc voulu raconter la vie de l’empoisonneuse, par la bouche de sa fille, qui tente de sauver sa peau en révélant tous les secrets de sa mère.
Naturellement, j’ai retrouvé ses formules de poisons foudroyants, laissant peu de traces détectables, et je les ai racontées dans mon livre ; mais j’ai eu la prudence de ne pas indiquer les dosages, car je ne veux pas avoir de meurtres sur la conscience !
La Griffe Noire : Isabelle, vous vivez aujourd’hui en Corse… Est-ce-que l’on peut s’attendre ou espérer une prochaine rencontre avec un personnage historique emblématique de la Corse ?
Isabelle Duquesnoy : Je vis en Corse depuis 30 ans, car c’est le berceau de la famille de mon mari. Naturellement, je m’intéresse à son histoire et d’ailleurs, je me demande comment ce peuple si souvent occupé par de nombreux envahisseurs depuis l’Antiquité, peut encore se montrer si gentil, si hospitalier, avec les étrangers qui débarquent sur ses côtes.
Alors, concernant la question de mon ouvrage en préparation…Ah ah ! Mystère ! Disons que je n’ai pas beaucoup de chemin à faire pour fouiller dans les archives, mais autant vous le dire tout de suite, je n’écris pas sur Napoléon !
Un énorme merci à Isabelle Duquesnoy pour cet échange ! Et pour ses belles histoires qui font aimer l'Histoire ! 
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